L'actualité de demain : CHUT LES ENFANTS, IL NE FAUT PAS RÉVEILLER LE MONSTRE ! par François Leclerc

Billet invité.

La sarabande est repartie en Europe, au risque de rompre une accalmie estimée trompeuse par les mauvais esprits. La coalition italienne ne tient toujours qu’à un fil, celui qui menace de se rompre dès le 9 septembre prochain, lorsque le Sénat devra confirmer ou non la déchéance de Silvio Berlusconi de son mandat de sénateur et son inéligibilité. Les roulements de tambour du côté de Gibraltar ne parviennent pas à faire oublier le scandale des revenus occultes de Mariano Rajoy, désormais suspecté d’avoir menti au parlement. Le gouvernement portugais se remet petitement de sa grosse crise estivale, sans rien avoir résolu, enregistrant la démission de son secrétaire d’État au Trésor, alors que l’on apprend que des documents compromettant sur des swaps qui font scandale ont été opportunément détruits.

Mais ce ne sont pas ces feux qui couvent ici et là qui ont conduit des dirigeants allemands en pleine campagne électorale à intervenir publiquement sur l’Europe. Afin qu’il ne puisse lui être reproché par la suite d’avoir tu la nécessité d’un troisième sauvetage de la Grèce, comme il l’a lui même expliqué, Wolfgang Schäuble a pris les devants pour reconnaitre sans attendre sa nécessité. Un modique montant de dix milliards d’euros a été avancé dans la foulée par le ministre grec des finances, qui correspond à peu près au trou immédiat de 11 milliards d’euros chiffré par le FMI, qui s’ajouteraient au 250 milliards déjà prêtés au total (compte non tenu d’un effacement de dettes de 107 milliards d’euros). Yannis Stournanas a tenu à préciser qu’aucune mesure d’austérité supplémentaire ne devrait selon lui intervenir à cette occasion…

Mais quid de la suite ? L’insolvabilité de la Grèce ne pourra pas être indéfiniment ignorée. Dans l’immédiat, un constat s’impose : 1/ la dette grecque a augmenté au lieu de diminuer ; 2/ de privée, elle est devenue publique ; 3/ elle a été de facto mutualisée entre les pays de la zone euro et le FMI. Rien qui ne soit clamé sur les toits !

Afin de couper court et manifester son opposition résolue à toute nouvelle décote de la dette grecque, en raison du transfert de créances opéré, Angela Merkel est montée au créneau en faisant valoir le risque de son « effet domino » au sein de la zone euro. C’est pourtant la question clé, avec celle d’une opération vérité sur le système bancaire. Celle-ci se prépare pour mars prochain sous les auspices de la BCE et les banques font leur tour d’échauffement en attendant octobre pour connaitre les modalités de l’examen de la valorisation des actifs auquel elles vont devoir se prêter.

Les mauvais souvenirs des stress tests précédents doivent être effacés, et la BCE prend à cet égard une lourde succession. De son analyse dépendront les objectifs de renforcement des fonds propres des banques (d’une manière ou d’une autre, c’est aussi la question) et la confiance retrouvée par le marché dans leur solidité, afin de faciliter leur réalisation. Pour donner un exemple, la notion de prêt non performant va devoir être unifiée au sein de la zone euro. Dans l’immédiat, les banques tentent de rectifier des calculs trop avantageux pour se présenter sous les meilleures auspices.

Tout ne sera pas réglé pour autant, il s’en faut, car il reste encore à décider quelle sera l’autorité chargée de la mise en œuvre des mesures de renforcement qui résulteront de l’examen de la BCE, une question qui a déjà fait couler beaucoup d’encre et a donné l’occasion au gouvernement allemand de refuser catégoriquement que la responsabilité en soit confiée à un organisme transnational. Une position qui laisse intacte la possibilité d’accommodements.

Y aurait-il deux monstres à ne pas réveiller ?